Artiste française installée à Berlin depuis 2010, Julie Chovin partage son atelier avec un autre artiste dans le quartier de Schönberg à proximité de son domicile de Kreuzberg. Le choix de Berlin s’est imposé à l’artiste qui avait besoin de temps et d’espace pour travailler. Terre promise des artistes depuis le début du XXè siècle, Berlin bénéficie de grands espaces disponibles aux loyers abordables jusqu’à il y a peu. Après s’être formée à l’École d’art et de design de Saint-Étienne, Julie Chovin effectue une résidence à la Générale en Manufacture à Sèvres en 2008-2009 puis est lauréate du Prix Icart en 2009 ce qui lui vaudra de montrer son travail à la galerie RX à Paris. Elle y présente sa série Objects portant sur la représentation d’objets équivoques (sextoys, pinces en métal, prothèses sexuelles..) peints à l’aquarelle sur papier de grand format. Ces objets agrandis à l’extrême et en détail brouillent leur reconnaissance par le regardeur. À cette époque, son travail interroge les injonctions faites aux femmes de sourire, d’être minces, d’être belles mais surtout de se taire ! (séries Empreintes ou Smiles). À partir de sa réflexion sur le(s) corps, Julie Chovin élargit son propos en s’attaquant à la “circulation des corps dans l’espace construit”. Berlin est en cela le matériau idéal tant la ville porte les traces de son passé comme un site archéologique où chaque strate dévoile et documente une époque.
Photographie, installation, dessin, vidéo… tous les médiums sont bons pour cartographier le centre urbain et son architecture intrinsèquement liés à ses habitants. En perpétuelle mutation et progression, l’architecture urbaine agit comme un corps qui se meut. La photographie Die Poesie der Baustellen (La Poésie des chantiers) montre cet espace in-fini (au sens que le paysage est en cours, en transition).
Série CONSTRUCTION/DESTRUCTION, 68 x 48 x 4 cm, photographies sur plexiglas, 2018
Flying Castle, plexiglas, 2018
Les vestiges des architectures du passé, notamment en lien avec l’idéologie communiste, sont également des marqueurs de cette inscription du corps dans un espace-temps. Polonaise After-Party, installation de 2018, tente de recréer l’architecture ambitieuse de l’hôtel Polonez de Poznan avec différents matériaux fragiles et éphémères (draps, ballons, scotch, miroir…). À l’architecture rigide communiste, l’artiste y substitue une architecture aérienne et festive. Architecture et Histoire permettent d’appréhender une ville, un pays. La série The Place to Be entamée en 2013 montre Berlin photographié, dessiné sous un autre aspect : sa culture underground, ses clubs et ses boîtes de nuit cartographiés de jour et vues de leurs arrière-cours.
Travail en cours de la série The Place to Be. Un livre sortira à la fin de l’année 2020
Cartographier permet de sauvegarder. Spéculations immobilières, destructions et reconstructions rapides de l’urbanisme, le visage des villes change en permanence. Dessiner de mémoire est l’un des processus artistiques employé par Julie Chovin.
Dessins réalisés lors d’une résidence au Japon en janvier 2020. Carte réalisée de mémoire d’une maison japonaise où se retrouvaient les résidents.
Dessin de la maison moderniste des grands-parents de l’artiste au Maroc. Travail en cours
Photographie imprimée sur tissu représentant les pieds de manifestantes Anti-Pegida
Texte : Clotilde Scordia
Photographies : ©Julie Chovin
Site de l’artiste : http://www.juliechovin.com/